LE blog sur la Qualité dans les Services...

vendredi, mars 09, 2007

Une carte d'infidélité

Des réflexes, donc. En voici un curieux.

Il est des magasins de vêtements comme des coiffeurs ou des teinturiers: on a tendance à utiliser souvent les mêmes. Quand on est un homme. Et, je ne le cache pas, c'est ma nature intime. Me voici donc une sucette au coin de la bouche (c'est plus sain que fumer et moins laid que mastiquer), arpentant nonchalamment un magasin de vêtements figurant parmi ma liste d'heureux élus , peaufinant mon choix. Comme disait le regretté Jules Renard: "je n'ai pas très bon goût, mais j'ai le dégoût très sûr".

Au point que je me laissais prendre par la fameuse "carte de fidélité". Je ne sais pas pour vous, mais j'en ai des tiroirs entiers. Leur nombre croit géométriquement à la vitesse de lapins laissés dans le noir. A ce train là, elles ne sont plus transportables qu'en brouette, ce qui, on me l'accordera, a tendance à ralentir le rythme des achats, donc l'effet inverse de celui recherché. Mais bon, une de plus, une de moins...

Me voici muni d'un stylographe à pointe bille en plein marathon de remplissage de cases, quand survient une question incongrue sur le formulaire: "numéro de téléphone mobile". C'est ça, pour recevoir des publicités, des appels de marketing direct et j'en passe (et des meilleures). Passons à la case suivante.

Ouf. Fin du formulaire à 4 volets. En dehors du mobile, il n'y a plus vraiment que mon goût irrépressible pour les épinards au sucre qu'ils ignorent à mon sujet. Ils n'avaient qu'à me poser la question. Je prends mon sourire 325bis (irrésistible) et tends mon pensum à la dame du comptoir. Elle le scrute ligne par ligne d'un air soupçonneux. Soudain, le sourcil en arcade, elle pointe un doigt accusateur sur la case fatidique: "vous n'avez pas mis votre numéro de mobile !".

Que me prend-il alors ? La lassitude d'expliquer mon point de vue, sans doute. Bref, j'ose une contre-vérité: "mais je n'ai pas de mobile..." (ce n'était qu'une contre-vérité et non un gros et éhonté mensonge car mon mobile était professionnel et je ne voulais pas de harcèlement commercial à ce numéro). La vendeuse sous-chef me lance un oeil torve, testant visiblement si c'était du lard ou du cochon (pas moi, ma réflexion). Jugeant sans doute que je ne plaisantais pas, elle m'inspecte de bas en haut et retour pour évaluer à quel tribu reculée je pouvais bien appartenir. Enfin, la sentence tant redoutée tombe, froide, implacable: "sans numéro de mobile, je ne peux pas vous délivrer de carte de fidélité". Mon fighting spirit ne fait qu'un tour: "pourquoi, il est obligatoire d'avoir un téléphone mobile en France ?...". "Non, mais c'est obligatoire pour la carte". "Bravo, non seulement je ne prends pas de carte, mais vous venez de perdre un client !...". Ses yeux mi-clos m'informent mieux que tout commentaire verbal sur un franc et massif désintérêt pour mon cas. Voilé dans la toge de ma dignité, je sors sous le regard étonné des autres clients, tous visiblement frénétiquement à la recherche de caméras cachées.

Rentré chez moi, je me connecte sur le site Internet de cette réputée chaîne de magasins afin d'y épancher un peu de fiel (fiel, pas fioul). Au bout de près de 20 minutes, je finis par trouver via le plan du site une page destinée aux réclamations. Ils ont eu beau la cacher le mieux possible, je l'ai débusquée ! Et je la remplis avec autant d'application que le formulaire de la carte quelques instants plus tôt. Je "valide" le tout et... Horreur, un message d'erreur. Après trois essais infructueux, je renonce. Ils sont forts, très forts. Mais je n'ai pas dit mon dernier mot. J'ai de la ressource.

A moi la DGCCRF !!! Derrière ces 6 lettres magico-ésotériques se cache la fameuse Répression des Fraudes. J'ai déjà bien souvent fait appel à eux. Bon, chaque fois en vain, c'est vrai. Soit ils ne répondent pas, soit ils ne s'estiment pas compétents. Donc, nouvelle demande: est-il légal d'exiger un numéro de mobile pour l'attribution d'une carte de fidélité en distribution ? Réponse ? Vous ne devinerez jamais. Je vous le dis ? Bon, allez. Ils n'ont jamais répondu. Quod erat demonstrandum.

Eh bien depuis, je ne suis jamais plus retourné dans ce magasin. Plus jamais.


A moi, la DGCCRF !...

Mon avis: cette fois, c'est un problème évident de formation, qui n'est en théorie pas difficile à résoudre. Mais faut-il encore que quelqu'un s'en aperçoive ?...

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La petite distribution

Et la grande distribution

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